Bivouac solo…


Avant que ne disparaissent le « Journal des Motards », fait par et pour les Motards, ma petite balade avait fait l’occasion d’un article, que je relis et trouve fort mal écrit… Même si je trouve au final que ce n’était pas « grand chose », l’aventure est au bout de la rue et j’ai bien appris de ce florilège d’erreurs….

Bivouac solo pour répétition des Millevaches

Prendre un temps pour soi, prendre l’air, se vider la tête apparaît parfois aussi évident que le témoin de réserve de carburant allumé sur le tableau de bord de ma belle BMW R110RT.

La moto est le meilleur des outils pour ça, avec seulement une journée et demie de disponible, ça sera assez pour aller rouler et envisager une sorte de voyage d’un jour. Jamais à court d’idées, motivé par la défiance de la vie renfermée et confortable, l’objectif est vite trouvé : nous sommes début février 2021, c’est idéal pour tester une nuit en bivouac et me faire une sorte d’hivernal !

Tous les évènements ont été annulés, dommage j’aurais bien aimé faire ma première hivernal avec les Millevaches. Destination trouvée : je vais me faire une sorte de répétition, même si je suis plus adepte du calme et des balades introspective. Passez un week-end dans le froid fera sûrement de moi un vrai motard… Ou plus sûrement éteindra le petit voyant de réserve dans ma tête.

Jeudi 11 février midi pétante, le téléphone est raccroché, l’ordinateur éteint, une heure plus tard je suis sur la BM direction le parc de Millevaches en Corrèze.

Bien sûr, un itinéraire a été préparé rapidement, les choses utiles et nécessaire fourrées dans les valises de la 1100RT et dans un sac sanglé sur la selle. Ma moitié n’est pas rassurée : la météo n’est pas optimiste, nous convenons de faire un point météo à 16h, c’est le point de non retour avec ce couvre-feu, je ferai demi-tour si ça s’annonce trop mal.

L’itinéraire prévoit d’aller sur zone le plus directement et facilement possible et rentrer par les petites départementales le lendemain. La BM trace : Saint-Jean-d’Angély, Angoulême, Limoges les grands axes. Cette moto est vraiment chouette elle me protège bien avec sa bulle réglable et ses poignées chauffantes, elle s’emmène facilement, le flat twin répond toujours doucement, le guidage est facile malgré ses 320 kg plein/charger… Sans le pilote. Arrêt à Limoges pour faire le plein, un GPS de randonnée me guide correctement.

Enfin, les petites routes

Dès que la capitale de la porcelaine et du Limousin est dans le s, le paysage change rapidement, le décor de devient tout en relief, montagne, prêt, vagues, sapin, virolos et hameaux montagnards,tout à fait charmant.

La route est belle, le bitume régulier, les virages s’enchaînent sur un filet de 4e, le Metzeler Z8 derrière et rassurant : je penche donc je suis. À consommer avec modération quand même. À 16h, point météo, je compte sur ma chance, je poursuis.

Puis à l’approche de la Corrèze, la qualité du revêtement se dégrade, le marquage au sol disparaît, quelques nids de poule, gravillons, terre et branches laissées par l’exploitation forestière, la prudence et de rigueur, le roulage est tranquille sur un filet de 3e, je profite du paysage, c’est un chouette coin.

Installation du bivouac

Presque surpris d’être arrivé, ces 260 km ont été avalés goulûment, reste une piste de sable et gros cailloux sur 500 m à descendre pour pouvoir rejoindre l’endroit prévu de bivouaquer, repéré sur le site parc4night. Aucun souci pour la RT qui s’est pris pour une GS sur ce demi kilomètre.

Moto béquillée, je remonte le chemin à pied pour me dégourdir les jambes, téléphone rapidement à celle que j’aime qui m’annonce une catastrophe météo venir, ça ne m’inquiète pas vraiment. Mise en place du campement, petite toile de tente qui tient du jouet, mais très légère et pas encombrante. Le matelas auto gonflant a décidé de se séparer de sa valve… Mais heureusement, une plage de sable parfaitement plate et lisse évitera trop d’unconfort. Je range un peu tout, installe sa bâche de protection sur la moto : elle mérite un peu d’attention, je tiens à ce qu’elle reste propre avec ses 20 ans et ses 110 000 km. Après un dernier point météo plus mitigé, j’avale un repas froid… Dommage, ici il y a tout ce qu’il faut pour faire une flambée : Pierres en rond, bois mort, je n’avais pas prévu ça, je note mentalement tout ce que j’ai à améliorer pour la prochaine fois…

Nuit glaciale…

La nuit tombe assez vite, la fatigue m’emporte. Progressivement, à chaque heure tout au long de la nuit, réveillé par le froid je rajouterai une couche du vêtements. Totalement réveillé à 6h avec deux pantalons, deux paires de chaussettes, trois couches sous la polaire, bonnets et gants en laine… Le froid m’a pris par les pieds dans la nuit, impossible de me réchauffer. Ma main effleure l’intérieur de la toile : la condensation a givré à l’intérieur.

Le départ sera assez rapide quand même. Petit déjeuner froid puis pliage du campement. Nouvelle inspection à pied du chemin, pour me réchauffer, repérer où, dans le noir, la BM devra poser ses roues et aussi pour m’assurer que la route en haut est praticable, sait-ton jamais.

L’heure du retour

À 7h, démarrage, klong (première, arrrh embrayaze à sek germanikeu!) blank-blank (gros bruit de casserole de la centrale ABS qui s’initialise au premier tour de roues…) Debout sur les cales-pieds, le chemin se remonte prudemment, mais très aisément, avec un coup de gaz ou ça commençait à être un peu gras, encore surpris par l’aisance de ma moto dans cet exercice, puis début de l’itinéraire touristique au fur et à mesure que le soleil se lève. Les petits virages s’enquillent gentiment sur un filet de gaz de 3e, quelques épingles, des routes sales, prudents sous une pluie de flocons fondue.

Je m’égare une fois, deux fois, trois fois, ce n’est pas très grave, Tarnac, Bugeat, je trouve l’endroit vraiment sympa, tout en reliefs, en virages, en forêts. Arrivée à Égletons, le ciel est bien bas, toujours de la neige fondue, dégradation prévue, c’est vraiment de la petite route depuis une centaine de kilomètres. Se pose le risque d’être en pleine pampa avec une météo vraiment dangereuse pour un deux-roues, la météo semble compliquée au nord, je décide de me rallonger pour limiter les risques d’un naufrage routier : autoroute vers Tulles, puis Bordeaux A10 vers le nord. C’est dommage mais j’ai mon quota de bellesbalade.

Le pilote dégoulinant

Les premiers afficheurs sur l’autoroute annoncent « prudence, risque de pluie verglaçante ». Pas rassurant… Mais conforté dans ce choix de rentrer dare-dare ! Rapidement la pluie devient un vrai déluge… Des seaux d’eau sur la BM et son pilote qui filent sur Bordeaux, malgré tout en confort et en sérénité, ne laissant entendre q’un discret ronronnement et voir le nuage d’eau évacué par les gommards… Le pantalon d’hiver a commencé fuiter, les gants non Waterproof d’hiver sont imbibés, progressivement la botte gauche, Waterproof, et corrompue par une infiltration…

Arrêt carburant sur l’autoroute, pilote dégoulinant… À la gare de péage avant Bordeaux le déluge sur les échappements fait remonter un nuage de vapeur d’eau, impressionnant comme condition et… Impossible de renfiler le gant de gauche, la doublure de deux doigts s’est barrée, impossible à remettre avec les mains mouillés. Je prends les gants mi-saison, cuir non étanche pour finir sur environ 250 km, toujours sous une pluie battante et une température de 2°c, ce sera supplice pour les doigts.

Sur l’autoroute A10, les gendarmes arrêtent systématiquement les poids-lourds sur la file de droite, sur plusieurs dizaines de kilomètres : des accidents du aux pluies verglaçantes dans les pays de la Loire ont motivé ce filtrage je l’apprendrai en arrivant.

Avec ce retour geler et précipité, cette nuit givrée, ce bol d’air frais d’à près de 800 km, la conclusion et qu’il faut faire les choses sans trop se poser des questions, profiter de l’instant et ne pas attendre les beaux jours pour rouler, la retraite pour se lancer… Dix jours après cette balade, par un petit matin pluvieux, une flaque de gasoil dans un rond-point me fait chuter. Six jours plus tard, je suis admis aux urgences à l’hôpital et ressors inapte à tout effort pour plusieurs mois. Nous voilà tous les deux, moto et pilote, en convalescence. Mais nous serons prêts pour nous consoler des sanglots longs des violons de l’automne, d’un feulement heureux de bicylindres à plat.


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